Bio English version (Follow the link)
Si à 11 ans j’ai définitivement quitté la littérature pour enfant, c’est la faute à Thérèse Raquin. Cet été là, je traînais sans le savoir un désœuvrement Flaubertien dans le petit appartement de mes Grands-tantes, à Clermont-Ferrand. A l’heure de la sieste, le silence me poussa jusqu’à leur maigre bibliothèque, un rayonnage dans le cosy qui me servait de lit. J’y trouvai les œuvres complètes de leur cher frère, Emile Guérinon, mon grand-oncle donc, mort d’ennui sans doute devant la postérité. Moi qui voulais devenir l’écrivain de la famille, je découvrais que la place était prise. J’en conçus quelque amertume, puisque le « Thérèse Raquin » d’Emile Zola l’emporta sur « La Vestale du Gange » de mon illustre ancêtre. Pauvres vierges du temps jadis !
Ce livre m’expulsa d’une longue période Blytonienne qui m’avait enthousiasmée. Je m’y étais essayée à un premier roman fortement inspiré de mon auteur favori, au titre évocateur : « Nathalie et les hommes en rose », le tout à la plume sergent major. Le titre à lui seul avait mangé une bonne heure de mon art. J’ai laissé Thérèse Raquin dans son cosy. Je suis repartie, pleine de ses violentes passions, et envieuse de cet Emile Guérinon et des deux télégrammes que lui avait envoyés la grande Sarah Bernhardt, un soir de première à la Comédie Française.
Il y eut « Le journal d’Anne Franck », « Mon bel oranger » de Vasconcelos, « Les chevaux masqués » de Henri-François Rey et « Salammbô » de Gustave Flaubert. Les oeuvres complètes de Boris Vian, Agatha Christie, Cauvin et Cesbron. « La Peste » de Camus, le théâtre de Ionesco, celui d’Anouilh et Giraudoux. J’éprouvais une forte fièvre pour « Les lettres portugaises » que je lisais à voix haute. Je découvris en même temps Franz Kafka et Richard Matheson.
Entre temps, la vie m’avait ratée, elle avait épuisé mes rêves d’enfant. A trente-deux ans, pour échapper à un travail qui m’épouvantait, je décidai de passer un bilan de compétences. En face de moi, une femme : Dominique.
– Que voudriez-vous faire ?
– Je ne sais pas, je n’ai pas d’idée.
– Mais… si tout était possible, on ne parle ni d’argent, ni de compétences. Tout est possible, qu’est-ce que vous faites ?
Un temps de recul et la réponse a fusé :
– J’écris.
– Bien. Alors ? Qu’est-ce que vous attendez ?
Voilà ! Il m’avait fallu vingt ans pour trouver Dominique. Je l’ai gardée comme amie, on ne quitte pas une femme d’aussi bon conseil.Depuis, je travaille…
L’écharde du silence – Le Rocher 2004, extrait de « La lettre à Guy Rouquet ».
Romancière, nouvelliste, poète, Frédérique Martin écrit aussi pour la jeunesse. Elle a remporté plusieurs prix dont le Prix de la Ville de Palaiseau en 2001 et le Prix Prométhée de la nouvelle en 2004 pour son recueil L’écharde du silence paru aux éditions du Rocher.
Parallèlement à ses livres, elle produit des textes de commande – En quête de Job, autour de la lutte ouvrière et citoyenne de l’usine Job à Toulouse ; Tu es un Homme, mon fils écrit pour la Novela dans le cadre d’un binôme auteur/chercheur avec l’anthropologue Morgane Gibert ; ou encore sa participation à la revue Espace du CNES avec Dissoudre la distance.
À plusieurs reprises, elle bénéficie de bourses de soutien à la création littéraire pour l’écriture de ses livres.
Membre de la SGDL et de la SOFIA, elle est aussi, Présidente du jury du concours de la nouvelle universitaire du Crous de Toulouse. Elle mène, par ailleurs, des missions d’accompagnement éditorial et de collaboratrice d’ouvrage pour diverses maisons d’éditions.
Frédérique Martin multiplie les collaborations artistiques, notamment autour de lectures performances de ses textes. Elle a adapté plusieurs de ses nouvelles, et successivement mis en scène ses livres : Papier du sang, Femme Vacante, Zéro le monde, Le vase où meurt cette verveine et J’envisage de te vendre. Elle a ainsi travaillé avec Agnès Sourdillon, Roger Borlant, Francis Azéma, Marie Sigal, Christophe Haunold… Dernières créations en date, dans le cadre d’une déclinaison transmédia de son recueil de nouvelles J’envisage de te vendre (j’y pense de plus) – (Belfond) :
- un court-métrage adapté du recueil éponyme, dans lequel elle joue plusieurs personnages et assure aussi la voix off, avec le réalisateur Hugo Moreau.
- Une lecture visuelle et sonore avec le réalisateur Ouahide Dibane autour du même recueil pour le marathon des mots.
Après des années d’interventions en milieu scolaire et en médiathèques, ainsi qu’une collaboration au long cours autour de la nouvelle avec le CROUS de Toulouse, elle anime des Ateliers résidentiels de création littéraire : Démarrer son projet d’écriture : du vécu à la fiction et Faire progresser son manuscrit. Ils reçoivent des participants français comme étrangers, et sont, le plus souvent, associés à des lectures publiques de ses livres et une mise en voix des textes produits en atelier par leurs auteurs.
Clermontoise de naissance, elle est toulousaine d’adoption.
Bio – English version
Frédérique Martin is a French novelist, short story writer, and poet. She writes for adults and children and has won several awards for her work, including the Prix Prométhée de la nouvelle for L’écharde du silence in 2004. Her latest collection, J’envisage de te vendre (j’y pense de plus en plus) (I’m Considering Selling You (I’ve Been Thinking About It More And More)), published by Belfond, was shortlisted for Prix Place aux Nouvelles 2017. ‘The Despair of the Roses’ is the first story in this collection. Frédérique is a member of writers’ associations including SGDL and CRL Midi-Pyrénées and is a jury member for the Crous de Toulouse short story prize. She teaches creative writing, and reads regularly in schools and libraries. She has adapted some of her work for stage and film. In her latest artistic collaboration with director Ouahide Dibane, she plays two roles and does the voiceover for the short film of “The Despair of the Roses.” Further information can be found here.