Qu’est-ce qu’un bon père ?

noel-12-2008

Noël – 1er décembre 2016

Qu’est ce qu’un bon père ?

Il y a les pères que la naissance nous donne et il y a les pères qui nous choisissent. Lorsque tu as rencontré maman, c’est toute une famille que tu as prise sous ton aile. Tu as bouleversé ta vie d’homme seul, pour accueillir Babeth, la femme que tu aimais, ses deux filles, ses parents et même ses tantes que nous appelions les Nénènes. Tu as préparé un nid dans la maison d’en Pécoul avec beaucoup de chambres et une grande table que nous avons garnie de nos coups de gueule et de nos rires à la moindre occasion. Tu nous as donné des frères et tu as veillé sur la tribu pendant plus de 40 ans.

Qu’est ce qu’un bon père ?

Il y a dix ans, tu nous as adoptées, ma sœur et moi. En nous offrant ton nom, tu voulais nous donner l’assurance que nous étions de ta famille à défaut d’être de ton sang. Tu voulais, une dernière fois, nous mettre à l’abri. Devant le notaire, tu t’es assis dans un fauteuil, Myriam d’un côté et moi de l’autre, sous le regard de maman, et tu as dit : « On dirait un mariage ». C’en était un, papa, qui te liait à tes filles dans la joie comme dans la peine, dans la santé comme dans la maladie. Car c’est un privilège d’avoir été choisies par toi.

Qu’est ce qu’un bon père ?

Un jour de décembre dernier, un jour de gel et de misère, tu es devenu petit dans un monde où tant de gens cherchent à être grands. Alors qu’en vérité, les petits seront toujours nos seuls maîtres. Nous nous sommes rassemblés autour de toi et de maman. Enfants, petits-enfants, gendre et belle-sœur, pas un n’a manqué ton appel. Nous avons pleuré, nous avons ri, pleuré et ri encore. Nous avons marché avec toi – tic tac tic tac – puis nous nous sommes assis avec toi, puis nous nous sommes couchés avec toi et, finalement, nous avons suspendu notre souffle avec toi. Au cœur de tout, maman, ta Babeth, présente du premier au dernier moment. 356 jours, papa, à vivre dans un temps qui était devenu le tien.

Qu’est ce qu’un bon père ?

Un bon père est un homme qui donne son amour à un enfant et ne le reprend pas. Cela seul rachète toutes les erreurs que cet homme aura pu commettre et qu’il ne nous appartient pas de juger, puisque nous tous ici présents en avons commis et en commettront encore.

Moi, ta fille aînée, au nom de ma fratrie, pour Myriam, pour Sébastien et pour Vincent, je te dis ici que tu as été un bon père. Cette année où tu es devenu petit, j’ai pris une grande leçon de vie. Je te remercie avec gratitude pour ce dernier cadeau. J’ai aimé chaque instant passé avec toi, chaque geste, chaque soin qu’il a fallu donner, chaque mot arraché au silence. Ces souvenirs nourriront ton absence.

La dernière fois que j’ai entendu ta voix, tu luttais pour respirer. Je t’ai murmuré à l’oreille « Tout va bien », tu as répété : Tout va bien, tout va bien, tout va bien.

Tout va bien, papa,
Les lampes restent allumées pour éclairer ton départ
Dehors, le grand ormeau t’honore de sa puissance
Demain, le jardin gardera l’empreinte de ton pas
Et sous la terre qui sommeille encore
Perceront bientôt des graines que tes mains savaient réchauffer.
Tu vois, tout va bien
Nous apprendrons à barrer seuls
Déjà, nous apprenons à déchiffrer les signes qui nous parlent de toi.

Cet article a 10 commentaires

  1. armelle

    Merci, Frédérique, de partager ce texte si magnifique et juste, Frédérique. Je viens moi aussi de perdre mon papa, et ces mots résonnent fort en moi. Je t’embrasse. Armelle

  2. marion rouillard

    quelle délicate écriture… bravo d’avoir savouré ce père. bon courage pour les moments quand même tristes,
    bizoux à toi et à votre famille
    marion

  3. Claire

    Quel bel hommage, j’aurai voulu en avoir un comme le tien… Garde le précieusement, son souvenir est une perle de nacre

  4. Stephie

    Quel beau texte, quelle puissance ! Je l’imagine à la hauteur de l’homme qu’a dû être ton papa !
    Et les gens que l’on aime et qui nous aiment le plus n’ont pas besoin d’avoir le même sang que le nôtre, je te le confirme

  5. Didier

    Toujours autant d’émotions dans vos écrits, comment rester insensible à un tel récit ?
    Je vous souhaite de belles fêtes de fin d’année… en famille.
    Amitiés

  6. Gilles

    Salut Noël !

  7. Pauline

    Frédérique Frédérique Frédérique… Merci. Pauline

  8. Hélène

    Superbe photo de Noël… que je préfère garder en mémoire. Beau texte, mais ça a été dit. Vous savez, Babeth le sait, que quand j’arrive à En Pécoul, c’est comme si j’arrivais chez des cousins… Je ne pouvais pas être près de vous tous, la faute à ces bon sang de kilomètres. J’ai pleuré en lisant le beau texte adressé à Noël et à son coeur gros comme ça. Votre Papa et votre Maman sont de belles personnes. Hélène

  9. Zoë Lucider

    Je l’avais commenté sur FB, je le relis aujourd’hui avec le même train de frissons sur mon échine. Tu as écrit pour tous les pères qui ont bon an mal an accueilli ce fardeau-privilège : élever un enfant.

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